Après avoir récemment relu Carmilla, et vu une adaptation théâtrale de ce court roman, il était logique que je m’aventure dans Millarca d’Orlane Escoffier, tout juste réédité.
Dans ce roman, à peine plus gros que le texte original, l’autrice donne la parole à la vampire et lui offre l’occasion de rétablir sa vérité sur les événements qui se sont passés en Styrie. Le tout dans un récit-cadre où le temps d’une nuit, elle raconte son histoire à une jeune éditrice parisienne, Mona (comme la Mona Mayfair de la trilogie des sorcières d’Anne Rice).
L’histoire est-elle aussi forte que celle de Sheridan Le Fanu ? Non, car il reste des trous dans les explications (notamment comme Laura a pu avoir des enfants normaux, si le premier marqué du sceau de l’infamie n’a pu être sauvé – sans contamination ! – que par la vampire). Et, car l’action aurait mérité d’être plus condensée par endroits, et plus étoffée à d’autres.
Est une bonne lecture ? Oh que oui. Une fois entamé, et malgré une journée chargée par ailleurs, je n’ai eu besoin que de six heures pour le lire. Et la Carmilla/Millarca de l’autrice est fascinante de par sa naïveté : de son enfance étrange à Paris aux événements dans le château de Laura, elle semble quasi innocente, un peu comme si les rôles entre Laura et elle, s’étaient inversés. Les deux jeunes femmes portent chacune un poids très lourd sur elles et sont toutes deux « maudites » à leur façon : l’une en étant maintenue dans l’ignorance jusqu’à ce qu’une gouvernante alcoolique lui donne les premiers indices, et l’autre en étant victime d’un prédateur bien trop proche. Et si l’histoire ne s’arrête pas au départ du château, mais déroule également comment Millarca accède à son héritage sanglant et l’immortalité qui en résulte, elle a l’immense mérite d’offrir une conclusion satisfaisante à l’histoire des deux amantes qui, chacune ayant choisi une voie différente, trouvent finalement un apaisement et une conclusion tendre à leur histoire.
S’il n’est pas nécessaire d’avoir lu Carmilla pour apprécier ce roman, l’autrice a une bonne culture vampirique qui ne se limite ni à Sheridan Le Fanu ni à Bram Stoker, mais pioche également dans la littérature et le cinéma du XXe siècle. Si tel est également votre cas, vous n’en apprécierez que plus ses clins d’œil et votre lecture. Sinon, une fois le livre refermé, il vous donnera l’occasion de vous replonger dans la version officielle de Carmilla, telle que narrée par Sheridan Le Fanu.
Millarca
d’Orlane Escoffier
Éditions Goater