Rosetta d’Eli Lin est une bande dessinée plutôt originale tant dans la forme que dans le fond. Dans la forme, car ce manhua taïwanais mélange les pages en noir et blanc, celles entièrement colorées et celles avec juste une touche de couleur au gré de la fantaisie de l’autrice. Et dans le fond, car, à partir d’une boutique d’antiquités et de son étrange vendeuse, elle tisse des récits intéressants, mêlant musique, histoire, mode et beaucoup de poésie.
Dans une rue perdue de Tainan, se trouve une boutique d’antiquités. En touchant les objets, la propriétaire des lieux peut y lire les histoires qui y sont rattachées et les déguste avec son amie aveugle. Le premier tome, La soliste du temps, nous présente divers objets et différentes histoires, dont celle particulièrement émouvant de Velma et de sa muse, Veronica. Le deuxième, Un festin de cendres, déroule une tragédie unique : celle de Fang Meiling, enfant star qui peine à définir qui elle est et ce qu’elle veut à l’âge adulte.
L’antiquaire elle-même et sa boutique sont bien mystérieuses, et certaines planches nous laissent entrevoir bien des histoires autour d’elles. Mais nous ne les découvrirons peut-être jamais, car, pour l’instant, Rosetta ne fait que deux tomes tant chez son éditeur taïwanais qu’en France. La toute dernière page restant ouverte, qui sait ?
Le style d’Eli Lin, très inspiré de la mode et très « pointu », ne correspond a priori pas du tout à mes goûts graphiquement, mais elle y met une telle énergie et compose ses pages de manière si originale que je me suis laissée séduire. Plus que d’autres illustratrices ou mangaka, sa mise en page et sa façon de raconter ses histoires m’ont rappelé le Suspiria de Dario Argento ou pour le tome 2 plus particulièrement, All That Jazz de Bob Fosse. Mais je suis certaine que les fans de Nana apprécieront également cette œuvre. En tout cas, personnellement, je suis conquise et prête à en découvrir plus d’Eli Lin, autour de cette boutique ou ailleurs.
Rosetta t.1 et 2
d’Eli Lin
traduction d’Émilie Gervaise
Éditions Mahô
